Loi du 28 octobre 2022, mémorial A n°541 du 4 novembre 2022 (la « Loi »)
L’objectif principal de cette Loi est de proposer une procédure alternative à la liquidation judiciaire afin de permettre d’évacuer d’une façon plus rapide et effective les procédures de liquidation judiciaire qui trouvent souvent leur origine dans des manquements répétés au droit des sociétés (absence de siège social, démission de tout le conseil d’administration qui n’est pas remplacé, défaut de dépôt des comptes annuels au RCS…).
La loi entrera en vigueur à compter du 1er février 2023.
I. Champ d’application de la Loi
En vertu de l’article 1 de cette Loi, sont concernées par cette procédure, toutes les sociétés commerciales
1) qui poursuivent des activités contraires à la loi pénale ou qui contreviennent gravement aux dispositions du Code de commerce ou des lois régissant les sociétés commerciales, y compris en matière de droit d’établissement,
2) qui n’ont pas de salarié et
3) qui ne disposent d’aucun actif.
Au sens de l’article 2 de la Loi, sont exclus de cette procédure les établissements de crédits et autres établissements financiers dont la Loi fait référence, les entreprises d’assurance, les organismes de placement collectif, les fonds d’investissement spécialisés, les SICAR, les dépositaires centraux, les fonds de pensions, les organismes de titrisation, les établissements de paiement et les établissements de monnaie électronique, les fonds d’investissement alternatifs et les sociétés exerçant la profession d’avocat.
II. Procédure
Lorsqu'il existe des indices clairs et concordants qu'une société entre dans le champ d’application de la Loi, conformément au paragraphe qui précède, le Procureur d'État peut demander au gestionnaire du Registre de Commerce et des Sociétés (le « Gestionnaire du RCS ») d'engager la procédure de dissolution administrative sans liquidation de cette société.
Seul le procureur d’État peut demander au gestionnaire du RCS d'engager la procédure de dissolution administrative, à l'exclusion de la société elle-même ou d'un tiers intéressé.
Le Gestionnaire du RCS doit ouvrir la procédure de dissolution administrative sans liquidation dans les trois jours de la réquisition effectuée par le procureur d’État.
Le Gestionnaire du RCS doit ensuite notifier la décision d’ouverture de la procédure par lettre recommandée avec accusé de réception adressée au siège de la société tel qu’inscrit au registre de commerce et des sociétés et procède à sa publication par extraits dans les trois jours dans deux journaux édités au Grand-Duché du Luxembourg ainsi qu’au Recueil électronique des sociétés et associations (le « RESA »)
À partir de la date de la publication de la décision d’ouverture de la procédure, le Gestionnaire du RCS vérifie que les conditions d’ouverture de la procédure visée par la Loi sont remplies, notamment l'absence d'actifs et de salariés, et demande à cet effet des informations sur la situation financière et administrative de la société à certaines entités et administrations (les banques, entreprises d’assurance, bureaux des hypothèques, Administration du cadastre et de la topographie, SNCA, CCSS…). Ces entités et administrations ont un mois pour divulguer les informations demandées.
Après avoir effectué sa mission de vérification, le gestionnaire du Registre de commerce et des sociétés informera le procureur d’État du résultat de ses vérifications.
Si les vérifications n’ont pas permis de confirmer que la société entre dans le champ d’application de la Loi (et respecte les conditions cumulatives précisées ci-dessus), le procureur d’État demandera au Gestionnaire du RCS d’arrêter la procédure et de lui renvoyer le dossier, la décision d’arrêt de la procédure sera publiée au RESA.
A l’inverse, le procureur d’État demandera au gestionnaire du Registre de commerce et des sociétés de poursuivre la procédure de dissolution administrative sans liquidation qui devra être clôturée au plus tard 6 mois après la publication de la décision d’ouverture.
La décision de clôture des opérations de la procédure de dissolution administrative sans liquidation sera publiée au RESA et entraînera la dissolution de la société.
III. Recours contre la décision d’ouverture de la procédure de dissolution administrative sans liquidation
La société concernée ou tout tiers intéressé qui estime que les conditions pour ouvrir une procédure de dissolution administrative sans liquidation ne sont pas remplies, peut introduire un recours contre cette décision devant le magistrat présidant la chambre du tribunal d’arrondissement siégeant en matière commerciale (le « Magistrat ») dans un délai d'un mois à compter de la publication dans le RESA. L’action est introduite et jugée comme en matière de référé.
Si le Magistrat estime que les conditions cumulatives d’ouverture de la procédure de dissolution administrative sans liquidation ne sont pas remplies, la procédure de dissolution administrative sera rapportée et la décision du Magistrat sera publiée au RESA.
Il faut enfin noter que si des actifs apparaissent après la clôture de la procédure de dissolution administrative sans liquidation, le tribunal d’arrondissement peut, à la demande du Procureur d’État, rapporter la décision de clôture de la procédure de dissolution administrative et ordonner la liquidation de la société par une procédure formelle de liquidation judiciaire avec nomination d’un juge commissaire ainsi qu’un ou plusieurs liquidateurs.
IV. L’impact de la Loi sur les procédures de faillite et d’insolvabilité
1. Disparition de la personne morale après la clôture d’une faillite
Dans le Code de commerce, il est inséré un nouvel article 536-2, ayant la teneur suivante :
« Le jugement de clôture des opérations de la faillite dissout la personne morale et emporte clôture immédiate de sa liquidation ».
2. Création d’un registre de l’insolvabilité
Les informations relatives aux procédures d’insolvabilité inscrites au Registre de commerce et des sociétés sont regroupées dans un Registre de l’insolvabilité (en abrégé REGINSOL) consultable sur le site internet du Gestionnaire RCS.
Le registre d’insolvabilité a pour but d’améliorer la communication d’informations aux créanciers et juridictions concernés et d’éviter l’ouverture de procédures d’insolvabilité parallèles. A cet effet, les États membres sont donc tenus de publier les informations pertinentes relatives aux affaires d’insolvabilité transfrontalières dans un ou plusieurs registres électroniques accessibles à tous.
3. Renforcement de la coopération interadministrative
Sur base de cette Loi, l’Administration des contributions directes et l’Administration de l’enregistrement, des domaines et de la TVA transmettent au procureur d’État les informations susceptibles d’être utiles dans le cadre de l’identification de sociétés commerciales susceptibles de faire l’objet d’une procédure de dissolution administrative sans liquidation 11.
4. Radiation des faillites anciennes
Conformément à l’article 19 de la Loi, les sociétés dont la procédure de faillite a été clôturée antérieurement à l’entrée en vigueur de la présente Loi, à l’exception des sociétés ayant mis à jour leurs inscriptions au RCS conformément à leurs obligations légales en matière d’inscriptions et de dépôt auprès du RCS postérieurement au jugement de clôture de la faillite, sont dissoutes de plein droit et rayées du RCS deux années après l’entrée en vigueur de la présente Loi et 15 jours après la publication d’un avis par le Gestionnaire du RCS au RESA constatant l’absence d’inscription et de dépôt.