Loi du 29 mars 2023 portant modification du Code du travail en vue d’introduire un dispositif relatif à la protection contre le harcèlement moral à l’occasion des relations de travail

La loi du 29 mars 2023 introduisant un dispositif de protection contre le harcèlement moral à l’occasion des relations de travail (ci-après la « Loi ») vient combler un vide juridique. En effet, jusqu’à présent, la convention du 25 juin 2009 relative au harcèlement et à la violence au travail transposant l’accord cadre autonome européen, déclarée d’obligation générale par le règlement grand-ducal du 14 décembre 2009 s’appliquait en la matière, alors qu’elle n’émettait que des recommandations et n’avait pas de réelle force contraignante.

La Loi introduit dorénavant au chapitre IV du Livre II du Code du travail, une définition claire de la notion de harcèlement moral. Conformément au nouvel article L.246-2, il faut entendre par harcèlement moral « toute conduite, qui par sa répétition, ou sa systématisation, porte atteinte à la dignité ou à l’intégrité psychique ou physique d’une personne. »

Dans le souci d’inclure un maximum de situations et de circonstances, l’article précise également que
« les voyages professionnels, les formations professionnelles, les communications en lien ou du fait du travail par quelque moyen que ce soit et même en dehors du temps de travail normal, font partie intégrante de l’exécution du travail. »

Le nouvel article L.246-3 du Code du travail ajoute qu’au même titre que l’employeur, le salarié, le client ou le fournisseur de l’entreprise doivent s’abstenir de tout harcèlement moral à l’occasion des relations de travail.

Cet article prévoit également des obligations nouvelles pour l’employeur qui doit :
- Veiller à ce que tout harcèlement moral à l’encontre de ses salariés, dont il a connaissance cesse immédiatement ;
- Déterminer, après information et consultation de la délégation du personnel (ou à défaut de l’ensemble du personnel), les mesures à prendre pour protéger les salariés contre le harcèlement moral au travail notamment :
  o En définissant les moyens mis à disposition des victimes d’un harcèlement moral (par exemple, l’accueil, l’aide et l’appui requis aux victimes, la prise en charge et la remise au travail) ;
  o En menant des investigations rapides et en toute impartialité sur les faits de harcèlement moral à l’occasion des relations de travail ;
  o En sensibilisant les salariés et les dirigeants sur la définition du harcèlement moral, ses modes de gestion au sein de l’entreprise et les sanctions contre les auteurs des actes de harcèlement moral ;
  o En informant la délégation du personnel (ou à défaut de l’ensemble du personnel), des obligations incombant à l’employeur dans la prévention des faits de harcèlement moral à l’occasion des relations de travail ;
  o En informant et en formant les salariés.
- En cas de connaissance de faits de harcèlement moral, l’employeur doit procéder, après consultation de la délégation du personnel (ou à défaut de l’ensemble du personnel), à une évaluation interne portant sur l’efficacité des mesures de prévention et sur la mise en œuvre éventuelle de nouvelles mesures de prévention à prendre ou sur la révision des procédures
déjà appliquées.

Si le harcèlement moral persiste malgré les mesures mises en place ou que l’employeur s’abstient de prendre les mesures adéquates, le salarié concerné (ou la délégation du personnel après accord du salarié concerné) pourra saisir l’Inspection du Travail et des Mines.

En présence d’actes de harcèlement moral, le directeur de l’Inspection du Travail et des Mines enjoint alors l’employeur de prendre les mesures nécessaires pour faire cesser immédiatement ces actes de harcèlement, dans un délai qu’il fixe. En cas de non-respect dans le délai imparti de l’injonction notifiée à l’employeur, le directeur de l’Inspection du Travail et des Mines pourra infliger à l’employeur une amende administrative allant de 251.-EUR à 2.500.-EUR, conformément à l’article 246-7.

Le nouvel article L.246-4 du Code du travail instaure une protection du salarié victime, lequel ne pourra pas faire l’objet de représailles en raison de protestations ou refus opposés à un comportement de harcèlement moral de la part de l’employeur, d’un autre supérieur hiérarchique, d’un collègue de travail ou d’une personne extérieure en relation avec l’employeur. Dans même, le salarié qui aurait témoigné de faits de harcèlement moral ne pourra pas faire l’objet de représailles.

L’article ajoute que toute disposition ou tout acte engageant de telles représailles (par exemple, un licenciement) seront nuls de plein droit et en cas de licenciement, le salarié pourra au choix :
- Dans un délai de 15 jours suivant notification du licenciement, demander au Président du Tribunal du travail de constater la nullité du licenciement et d’ordonner son maintien ou sa réintégration dans l’entreprise ; ou
- Agir résiliation abusive du contrat de travail pour obtenir des dommages et intérêts en réparation du dommage subi du fait du licenciement et le cas échéant, du fait du harcèlement moral dont il a été victime.
Ces nouvelles dispositions sont assorties d’une amende de 251.-EUR à 2.500.-EUR prévue au nouvel l’article L.246-7. Encourent une telle amende :
- L’employeur, le salarié, le client ou le fournisseur de l’entreprise qui commet des actes de harcèlement moral en violation de l’interdiction visée à l’article L.246-3 paragraphe 1 ;
- L’employeur qui omet de déterminer les mesures à prendre pour faire cesser immédiatement les actes de harcèlement moral en violation de l’article L.246-3, paragraphe 3 ;
- L’employeur qui omet de procéder à une évaluation interne en violation de l’article L.246-3, paragraphe 4 ;
- L’employeur, le supérieur hiérarchique, le collègue de travail ou toute personne extérieure en relation avec l’employeur, notamment le client et le fournisseur de l’entreprise, qui ne respecte pas les interdictions visées à l’article L.246-4 paragraphes 1 et 2.

En cas de récidive dans un délai de 2 ans, ces peines peuvent être portées au double du maximum.

Aux termes du nouvel article L.246-6, le salarié victime peut encore refuser de poursuivre l’exécution de son contrat de travail et décider de résilier le contrat de travail sans préavis pour motif grave avec dommages et intérêts à charge de l’employeur dont la faute a occasionné la résiliation immédiate, conformément à l’article L.124-10 du Code du travail.